Interview de Christphe Gatineau, agronome auteur de «
Eloge du ver de terre », 2018.
«Notre survie dépend des vers de terre»

Vous citez l'INRA qui constate que 80% des vers de terre ont disparu des sols cultivés en France. Pourquoi s'en inquiéter ?
Les vers de terre nourrissent le sol qui nourrit les plantes qui nourrissent les êtres vivants, les animaux et les hommes. C'est donc simple: notre survie dépend des vers de terre.
Mais notre modèle agricole a brisé ce cycle. L'agriculture pratiquée depuis 50 ans a décidé de ne plus collaborer avec la nature. Les pesticides et les labourages tuent les vers de terre. L'INRA constate que 25% des sols sont victimes d'érosion, qui est la conséquence de la disparition du vivant et du ver de terre.
Tant que le ver de terre ne sera pas reconnu, il sera impossible de le protéger.
Vous dites «en France 200 espèces d'insectes sont protégés par la loi sauf le bourdon, l'abeille, le ver de terre…». Serait-ce une solution de le protéger ?
Oui, il n'est d'ailleurs même pas considéré comme un animal et puis comment aider ce qui n'existe pas?! Par ailleurs, reconnaître le ver de terre reviendrait à reconsidérer notre modèle agricole et revoir toute notre façon de faire de l'agriculture.
Un ver de terre est un marqueur de la vie du sol et de sa bonne santé. Un sol riche en matière organique, et donc fertile, est habité par les vers de terre. A l'inverse, un sol mineral est déserté par les vers de terre car ils y meurt de faim. Pour éviter cette situation, auparavant, les paysans nourrissaient leurs sols: ils cultivaient des bandes fleuries et privilégiaient la diversité végétale pour favoriser les pollinisateurs et nourrir les sols et la vie animale qui s'y niche.
Est-ce déjà trop tard pour agir ?
Au stade de l'effondrement de la biodiversité que nous connaissons, il faut agir vite. Il faut que l'agriculture coopère avec la nature et la biodiversité. Il est important de nourrir les sols. Le lombric terrestre vit 8 ans en moyenne et donne naissance à une dizaine d'individus tout au long de sa vie... ce qui est peu.suite & source :>> «Notre survie dépend des vers de terre» (lefigaro.fr) (2018)